« Malgré les difficultés, les gens ont toujours envie de se faire plaisir »

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Direction aujourd’hui le centre de Prague, près de la Place Venceslas, au milieu du passage Lucerna. C’est là qu’ont décidé de s’installer les Musso, un couple de pâtissiers français venu de Fréjus qui avait ouvert une pâtisserie il y a près de deux ans dans le quartier de Vinohrady. Nadine Musso nous a d’abord expliqué pourquoi elle et son mari ont décidé les hauteurs de Prague pour se rapprocher du centre :

« C’était un quartier magnifique mais il aurait été très difficile de rester en activité dans ce quartier… En plus on a eu quelques difficultés avec les propriétaires des lieux où nous avions installé notre magasin. »

Nous sommes donc dans le centre-ville, dans le passage Lucerna, où vous venez d’ouvrir cette nouvelle pâtisserie, la pâtisserie Saint-Tropez, avec une nouvelle architecture intérieure, qui permet aux clients de voir comment la pâtisserie est fabriquée.

« Oui, tout se passe là. On vend une pâtisserie traditionnelle donc il fallait aussi démontrer qu’on fait tout du début à la fin. Là il y a un biscuit qui va être monté dans un instant. »

Vous avez depuis longtemps une pâtisserie à Fréjus. Trouvez-vous ici tous les ingrédients qui vous permettent de fabriquer les mêmes produits que là-bas ?

« Maintenant oui. Un an passé ici nous a permis de trouver des fournisseurs. »

Qu’est-ce que vous ne trouviez pas en arrivant ?

« Je me souviens encore de la première fournée de croissants qu’on a faite ; la farine ne convenait pas. Le beurre n’était pas non plus constitué de la même manière, parce qu’on utilise un beurre particulier quand on fait un feuilletage au beurre. Donc le beurre vient de France, un beurre de tourage pour faire des croissants tous les matins. »

On parlait la semaine dernière des conséquences de la crise sur le secteur du luxe. On pourrait presque mettre la pâtisserie française dans une catégorie de luxe pour les consommateurs tchèques. Est-ce qu’on a du mal en ce moment avec les produits gastronomiques ?

« Je vais avoir du mal à être objective, parce qu’on a ouvert ici il y a une semaine seulement. Mais je pense que quand on fait un produit de qualité comme on en a toujours fait – à nous aussi de réguler notre production – les gens ont toujours envie malgré les difficultés de se faire plaisir, de s’asseoir ou d’emmener deux ou trois gâteaux parce qu’ils sont invités à déjeuner ou à dîner. Parce que peut-être qu’on va moins au restaurant et qu’on prépare plutôt à manger à la maison, et là le pâtissier à sa place. Ça reste un créneau qu’il faut conserver. »

Quelle clientèle visez-vous ? Les particuliers, les entreprises ?

« Les deux. Mais on ne peut pas aller trop vite, il faut qu’on reprenne nos marques. Notre souhait était de rejoindre le centre-ville, où il y a automatiquement beaucoup plus de mouvement, mais il faut aussi une certaine adaptation à nos produits… »

Je crois que c’est un investisseur tchèque qui vous a permis de vous installer dans le centre.

« C’est vrai, nous n’avons poursuivi qu’à cette condition. Notre clientèle, dans la rue Italska était d’ailleurs à 70% tchèque. »

Avez-vous eu du mal à trouver cet investisseur ?

« Non, pas vraiment. A un moment donné il y a un croisement, de la chance aussi. Les gens se rencontrent et imaginent qu’ils vont pouvoir se marier. C’est comme un mariage, nous sommes mariés maintenant et un mariage ça se vit au quotidien donc on verra ce que l’avenir nous réserve. C’est grâce à ce mariage que nous sommes là aujourd’hui avec une vitrine pleine de gâteaux, quiches et croissants. »

Un peu plus loin il y a aussi les chocolats, parce que j’imagine que l’échéance importante à court terme est Pâques.

« Tout à fait, et notre laboratoire a fait des performances, avec un pâtissier plein d’imagination. C’est un véritable challenge, parce qu’en dix jours il a fallu produire tout ça en même temps. »