Affaire H-System : un nouveau rebondissement dans le plus grand scandale immobilier tchèque

Photo: Ondřej Deml/ČTK

Plus de vingt-ans après le début des faits, l’affaire de la société H-System, laquelle avait escroqué, dans les années 1990, quelque 1 200 clients auxquels elle promettait de construire un logement, connaît un nouveau rebondissement. La Cour suprême vient en effet de débouter une soixantaine de ces clients, qui avaient décidé d’achever la construction de leur maison malgré la faillite de l’entreprise et qui se trouvaient en procès face à l’administrateur chargé d’indemniser les victimes. Ces 60 familles ont maintenant un mois pour quitter leur habitation.

Juge à la Cour suprême,  Zdeněk Krčmář,  photo: Jan Tomandl/ČTK
Les habitants concernés de la commune de Horoměřice, à l’ouest de Prague, sont sous le choc. Ils n’ont nulle part où aller et, ils l’ont déjà fait savoir, ils ne quitteront pas leur maison. Juge à la Cour suprême, Zdeněk Krčmář estime que les magistrats ont dû choisir la meilleure parmi des mauvaises solutions.

Quant à Josef Monsport, l’administrateur judiciaire en charge de la faillite de la société H-System, il voit lui d’un bon œil la décision des juges, même s’il refuse de parler d’un « succès personnel ». Il entend vendre ces biens immobiliers pour répartir l’argent obtenu entre les centaines de personnes qui ont été flouées dans cette affaire :

« Je dois penser au fait que je dois défendre les intérêts des gens spoliés dans la faillite, et pas ceux des quelques dizaines de famille de Horoměřice. Mais Petr Smetka, le fondateur de l’entreprise H-System, et ses assistants, ont escroqué plus d’un millier de personnes et il y en a encore d’autres. »

Photo: Ondřej Deml/ČTK
Un précédent administrateur judiciaire avait pourtant autorisé les familles de Horoměřice à poursuivre la construction de leur maison. Cependant, ces constructions n’ont pas été réalisées dans le respect des règles de droit. Les clients spoliés n’entendent pas abandonner la bataille pour autant. Ils envisagent désormais de se tourner vers la Cour constitutionnelle, leur dernière possibilité selon le ministre de la Justice Jan Kněžínek (ANO) :

« L’ordre judiciaire offre encore une possibilité et je suis quasiment persuadé que les clients de H-System l’utiliseront. Ils peuvent porter plainte auprès de la Cour constitutionnelle dans le cas éventuel d’une violation des droits fondamentaux et des libertés. La procédure n’est clairement pas terminée, mais elle l’est au niveau des tribunaux ordinaires. »

L’histoire de ces familles a suscité l’expression de nombreux commentaires de sympathie. Certaines communes ou associations se disent prêtes à trouver des solutions pour leur hébergement. Le chef de l’Etat Miloš Zeman a estimé qu’elles étaient victimes d’une injustice, tout comme le Premier ministre Andrej Babiš. Martin Junek, l’avocat qui défend ces personnes, a d’ailleurs rencontré le chef du gouvernement :

Martin Junek,  photo: Jaroslav Beneš/ČTK
« Bien sûr, nous devons être conscients du fait qu’il ne peut pas influencer la justice. Toutefois, nous avons été très heureux ce mardi, quand il nous a apporté son soutien et qu’il a parlé d’une injustice à notre encontre. Ses possibilités sont évidemment très limitées, mais il nous a promis qu’il pourrait jouer le rôle d’une sorte de médiateur dans cette affaire. »

Si cette affaire fait la une des médias tchèques, c’est parce qu’elle est le nouvel épisode de l’un des plus grands scandales immobiliers de la Tchéquie des années 1990. La société H-System, entre 1993 et 1997, année de sa faillite, a escroqué plus d’un millier de personnes. Moyennant une avance, elle leur proposait de leur livrer sous deux à trois ans un logement. Seules quelques dizaines de maisons sont sorties de terre avant que l’entreprise ne dépose le bilan, avec un préjudice d’environ un milliards de couronnes pour ses clients. Après de multiples rebondissements judiciaires, ils ne sont pas encore totalement sortis de cette affaire.