Affaire Huawei : le président Zeman remet de l’huile sur le feu

Photo illustrative: ČTK/AP/Andy Wong

L’affaire Huawei, société chinoise soupçonnée de cyberespionnage dans différents pays, a pris une nouvelle tournure en République tchèque ces derniers jours, après les déclarations de différents de ses protagonistes. Peu avant Noël, le Bureau national pour la sécurité cybernétique et d'information (NÚKIB) avait alerté sur un possible risque pour les intérêts du pays et appelé l’administration et certaines sociétés stratégiques à réagir en conséquence.

Photo illustrative: ČTK/AP/Andy Wong
« Nous ne pouvons pas permettre qu’une éventuelle attaque de nos infrastructures d’information ou d’importants systèmes d’information ait des conséquences sur la sécurité et le fonctionnement de la République tchèque en qualité d’Etat souverain. »

Jeudi, le ministre des Affaires étrangères, Tomáš Petříček, a rencontré l’ambassadeur chinois en poste à Prague, Zhang Jianmin, pour lui signifier clairement la position du gouvernement tchèque dans cette affaire mettant en cause les sociétés chinoises de télécommunications Huawei et ZTE. Suite à une première rencontre, fin décembre, entre le Premier ministre Andrej Babiš et Zhang Jianmin, l’ambassade de Chine avait publié sur Facebook un communiqué dans lequel elle avait rejeté tout soupçon d’espionnage et salué « la volonté du gouvernement tchèque de réparer les erreurs commises ».

Premier fournisseur mondial d'équipements de réseaux de télécommunications et deuxième fabricant de smartphones, Huawei a été la cible, ces derniers mois, des mêmes accusations dans plusieurs pays, et notamment aux Etats-Unis, en raison de ses liens supposés avec les services de renseignement chinois. Andrej Babiš avait toutefois rétorqué que son gouvernement n’avait commis aucune erreur, que le communiqué de l’ambassade n’était rien d’autre qu’un mensonge et qu’il n’y avait donc aucune raison de s’excuser de quoi que ce soit. Le Premier ministre a été soutenu, jeudi, par le chef de la diplomatie, Tomáš Petříček :

Tomáš Petříček,  photo: ČTK/Krumphanzl Michal
« J’ai fait savoir à monsieur l’ambassadeur que je ne considérais pas qu’il soit approprié d’interpréter et de rendre public le contenu de discussions informelles. La diplomatie doit servir à éviter les incompréhensions et je suis convaincu que notre réunion aujourd’hui permettra qu’il en soit ainsi à l’avenir. Nous nous sommes assurés avec monsieur l’ambassadeur de notre volonté de nous concentrer sur une coopération positive entre nos deux pays et je considère que l’affaire est close. Nous portons une grande estime à nos relations avec la Chine et le devoir que nous avons de protéger la sécurité des Tchèques ne nuit nullement à notre intérêt pour le développement des échanges commerciaux et économiques. »

Jeudi soir, le président de la République, Miloš Zeman, très attaché au développement des relations entre Prague et Pékin, a remis de l’huile sur le feu en déclarant, sur la chaîne de télévision privée Barrandov, que les activités du NÚKIB et du Service de renseignement et de sécurité (BIS) nuisaient aux intérêts tchèques en Chine, et notamment aux importants investissements du constructeur automobile Škoda et du groupe financier PPF.

Si les responsables du NÚKIB et du BIS n’ont pas daigné répondre à cette critique du chef de l’Etat, qui a également précisé que certains ministres étaient informés des possibles représailles chinoises, Andrej Babiš, lui, a tenu à rassurer tout le monde ce vendredi matin :

« Nous ne disposons d’aucune information selon laquelle la partie chinoise entendrait décider de sanctions ou de mesures de représailles. »

En attendant, si certains ministères et autres institutions ont cessé d’utiliser les téléphones portables de marque Huawei, nombreux surtout étaient les politiques à se demander ce vendredi si le président Miloš Zeman défendait d’abord les intérêts de la République tchèque ou ceux de la Chine.