En Turquie, Andrej Babiš a d’abord parlé affaires avec Erdogan

Andrej Babiš et Recep Tayyip Erdogan, photo: ČTK/Opatrý Marek

Andrej Babiš a achevé, ce mercredi, la première visite d’un Premier ministre tchèque en Turquie depuis onze ans. Une visite au cours de laquelle l’énergie et les échanges économiques ont constitué les principaux sujets de discussion.

Andrej Babiš et Recep Tayyip Erdogan,  photo: ČTK/Opatrý Marek
Si on peut imaginer qu’aller rencontrer Recep Tayyip Erdogan à Ankara n’est pas une sinécure, Andrej Babiš a néanmoins peut-être bien considéré son voyage en Turquie comme un bon moyen d’échapper à toutes les sollicitations dont il aurait été l’objet s’il était resté à Prague. L’annonce faite lundi par le procureur en charge de l’affaire du Nid de cigognes de ne pas poursuivre les poursuites judiciaires visant le Premier ministre tchèque a en effet suscité de multiples commentaires et réactions.

Cette visite a d’abord permis de parvenir à ce que le chef du gouvernement tchèque a qualifié de « tournant radical » lors de la conférence de presse donnée avec le président turc. Le « tournant » en question concerne le projet d’Adularya, qui devait aboutir à la livraison et à l’exploitation d’une centrale thermique située à côté d’une mine de charbon dans la province d’Eskişehir, dans le nord-ouest de la Turquie. Ce sont des sociétés tchèques, avec le soutien de la Banque tchèque d’exportation, qui ont été chargées de la réalisation de la commande pour un montant de 450 millions d’euros. Mais lorsqu’il s’est avéré, en 2016, que la qualité du lignite local ne répondait pas aux critères des chaudières construites, ne permettant ainsi donc pas l’exploitation de la centrale, les relations entre Prague et Ankara se sont tendues. Nationalisée depuis, la centrale, dont les trois appels d’offres lancés cette année pour la vente ont échoué, est aujourd’hui à l’abandon, toujours inachevée. Avant de quitter Prague lundi, Karel Havlíček, le ministre du Commerce et de l’Industrie tchèque, qui accompagnait Andrej Babiš, avait d’ailleurs été très clair sur cette question :

« Dans tous les cas, il faut bien savoir que la perte pour l’Etat tchèque dans ce projet sera importante. Ce qui importe donc désormais, ce n’est pas seulement de limiter le montant de cette perte, mais aussi de bien négocier les autres marchés en Turquie, de communiquer avec les organisations turques de façon à ce que tout se passe du mieux possible. »

Cette visite a donc permis de faire avancer les choses. La Turquie propose aujourd’hui à la République tchèque de reprendre l’ensemble des actifs de ce projet Adularya. Si les conditions de cette éventuelle reprise n’ont pas été précisées, la proposition semble plaire néanmoins à Andrej Babiš.

Andrej Babiš en Turquie,  photo: ČTK/ABACA/AA/
Au-delà de ce projet, Recep Tayyip Erdogan a annoncé que l’objectif de la coopération commerciale entre les deux pays devait être de parvenir à un volume d’échanges annuel de quelque cinq milliards de dollars. Un bilan encore loin d’être atteint puisqu’en 2018, il ne s’est élevé qu’à 3,6 milliards d’euros. Les investissements prévus dans le domaine de la défense par la Turquie, qui possède la deuxième plus importante armée au sein de l’OTAN, pourraient contribuer à rapprocher les deux parties de l’objectif, la réputation de l’industrie tchèque de l’armement n’étant plus à faire à l’étranger. Par ailleurs, des sociétés turques pourraient participer à la construction d’autoroutes en République tchèque.

Enfin, sur le plan diplomatique, Andrej Babiš a rappelé que la République tchèque soutenait la volonté de la Turquie d’adhérer à terme à l’Union européenne.

Après la Turquie et avant de revenir à Prague, le Premier ministre tchèque effectuera encore une autre visite en Hongrie, histoire de saluer un autre homme qu’il affirme admirer, Viktor Orbán.