Parfois contesté, le Sénat tchèque fête ses 20 ans d’existence

Le Sénat tchèque, photo: Krokodyl / CC BY-SA 3.0

Il y a vingt ans de cela, le 18 décembre 1996, se tenait la première réunion constituante du Sénat tchèque. Cet anniversaire a été célébré jeudi dans la discrétion. Malgré son rôle de garde-fou dans le processus législatif et plus largement dans le débat politique, nombreux sont ceux à remettre en cause son utilité.

Le Sénat tchèque,  photo: Krokodyl / CC BY-SA 3.0
Le taux de participation aux élections sénatoriales, en octobre dernier, peut donner une idée de l’attachement que portent les Tchèques à la Chambre haute de leur Parlement. Avec à peine un peu plus 15% de votants au second tour, le scrutin a été marqué par un taux de participation à son minimum historique en l’espace de vingt ans. En réaction, le président de la République s’était d’ailleurs ouvertement interrogé quelques jours plus tard sur le bien-fondé de l’existence de l’institution. S’il voit dans le Sénat une garantie pour le bon fonctionnement démocratique du pays, Miloš Zeman n’est en revanche pas convaincu de la nécessité pour la République tchèque de posséder une seconde chambre, en plus de la Chambre des députés.

En y regardant d’un peu plus près, le mode de renouvellement du Sénat est pourtant en lui-même une forme d’assurance du maintien d’une certaine pluralité politique en République tchèque, et ce comme l’a rappelé son actuel président, le social-démocrate Milan Štěch :

Milan Štěch,  photo: Miloš Turek
« Je pense pouvoir affirmer qu’il est heureux que le Sénat existe. Instaurer la démocratie dans un pays est une tâche dure et longue, mais la détruire est très facile. Sans le Sénat, il ne peut pas y avoir de révisions constitutionnelles. Or, ce n’est pas encore demain qu’une force extrémiste sera en mesure de disposer de la majorité à la Chambre haute. »

A la différence de la Chambre basse, où la totalité des 200 députés est renouvelée tous les quatre ans, le Sénat, avec l’organisation d’élections partielles, renouvelle un tiers de ses 81 membres tous les deux ans. Les Tchèques ont ainsi la quasi-garantie qu’aucun parti ou mouvement politique ne disposera de la majorité aux deux chambres du Parlement. Actuellement, ce ne sont ainsi pas moins de dix-sept groupes politiques, sans compter les indépendants, qui sont représentés au Sénat. Et bien qu’elle soit le parti le plus présent, la social-démocratie, qui possède également le plus grand nombre de sièges à la Chambre basse, n’y dispose « que » de vingt-sept membres. Un large consensus est donc très souvent nécessaire pour l’adoption de tout texte de loi, les partis de la coalition gouvernementale ne disposant pas nécessairement de la majorité des voix.

Le Sénat tchèque,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
Si le Sénat est donc désormais bien ancré dans le paysage politique tchèque, son existence n’a pour autant pas toujours été une évidence. Ce bicamérisme est la conséquence du choix de la Charte constitutionnelle de 1920 comme modèle pour la rédaction de la nouvelle Constitution de 1992. Pourtant, après l'adoption de cette Constitution, une longue controverse a suivi à propos de la mise en place effective de la seconde chambre. L'abolition du Sénat a même fait l'objet de plusieurs propositions de loi. Ce n’est qu’en 1996, soit quatre ans après le vote de la Constitution, que le Sénat tchèque a finalement été effectivement mis en place.

Et s’il possède un droit d’initiative qui lui permet de déposer une proposition de loi et ainsi de concurrencer la Chambre des députés, le rôle essentiel du Sénat consiste à examiner les textes déjà approuvés par la Chambre basse pour éventuellement les amender, les renvoyer à leurs auteurs pour une deuxième lecture ou alors les adopter définitivement avant de les transmettre au président de la République pour promulgation. Cela peut sembler peu, mais dans une démocratie comme l’est la République tchèque, c’est aussi (parfois) beaucoup.