Vaste opération de la police anti-corruption à Prague et Olomouc

Ivan Langer, photo: ČTK

Après l’affaire David Rath, du nom de l’ancien président de région accusé de corruption, y aura-t-il une affaire Ivan Langer ? En tout cas, ce dernier, ancien ministre de l’Intérieur du temps du gouvernement Topolánek, a été arrêté puis interrogé mardi par l’Unité de lutte contre le crime organisé, avant d’être relâché, sans avoir été inculpé. Cette unité de la police tchèque a mené mardi matin toute une série de perquisitions à travers le pays, et arrêté plusieurs autres personnes.

Photo: ČTK
C’est pour le moins une affaire compliquée qui a éclaté mardi, après la série de perquisitions menées par l’Unité de lutte contre le crime organisé, à Prague et notamment dans la ville morave d’Olomouc. Selon les quelques informations qui ont filtré pour l’heure, l’intervention de la police serait liée à une enquête pour abus de pouvoir par une personne dépositaire de l'autorité publique, trafic d’influence et corruption.

Mardi après-midi, les rares informations officielles ont été communiquées par le président de la police tchèque, Tomáš Tuhý :

Tomáš Tuhý,  photo: ČTK
« La seule chose que je peux dire en l’état actuel des choses, c’est que nous rassemblons les preuves et les témoignages d’après les interrogatoires en cours. Je peux confirmer qu’en effet plusieurs personnes ont été arrêtées et que des perquisitions ont été menées dans plusieurs endroits de République tchèque. Cette opération a été également dirigée vers les locaux de la police tchèque, en particulier, dans une direction régionale et dans une unité aux compétences nationales qui dépend de la présidence de la police. »

Certaines unités de police seraient donc aussi concernées, mais aussi l’ancien ministre de l’Intérieur Ivan Langer (ODS) ainsi qu’un de ses proches, un entrepreneur du nom d’Ivan Kyselý. Politiques, entrepreneurs, policiers : le profil des personnes concernées en dit long sur les ramifications de l’affaire.

Ivan Langer,  photo: ČTK
Mercredi matin, le quotidien Lidové noviny croyait savoir que celle-ci aurait un rapport avec le marché immobilier de la ville d’Olomouc et des programmes de subventions. La Télévision tchèque, elle, allait plutôt dans le sens de l’hebdomadaire Respekt qui, la semaine dernière, anticipait déjà une probable descente de la police tchèque en lien avec la centrale solaire photovoltaïque de Ševětín. D’après Respekt, un total de 100 millions de couronnes se serait évanoui dans la nature lors de la construction de la centrale, alors que cette même somme aurait été découverte par les enquêteurs sur les comptes d’un des principaux garants du projet. Jana Klímová est reporter pour l’hebdomadaire d’investigation :

« La centrale de Ševětín a coûté trois milliards de couronnes. Des sommes astronomiques ont été injectées dans ce projet. L’un des principaux garants de la construction de la centrale, achetée par la compagnie ČEZ en 2009-2010, était une société basée à Olomouc. Cette société est directement liée à l’entrepreneur Ivan Kyselý, l’une des personnes à laquelle la police s’intéresse tout particulièrement. »

La centrale de Ševětín,  photo: ČTK
En l’absence d’informations plus précises, les spéculations vont toutefois bon train dans les médias sur les raisons précises de ces perquisitions et de ces arrestations. Du côté de la police, on promet la transparence et d’informer en temps et en heure l’opinion publique, d’ici un à deux jours a priori.

Au ministère de l’Intérieur, de même, peu de commentaires sinon pour se féliciter de l’opération. Milan Chovanec :

« Je suis très satisfait de voir que la police n’a pas peur d’aller enquêter dans ses propres rangs. C’est certes désagréable, mais cela montre bien que la nouvelle direction de la police va dans le bon sens. C’est la police elle-même qui est à l’origine de la plainte contre certaines unités de police. »

Ce n’est pas la première fois que des personnalités politiques importantes sont inquiétées dans le cadre d’affaires louches. En 2013, une affaire de corruption liée de trop près au premier ministre d’alors, Petr Nečas, avait fait tomber son gouvernement. Le cas le plus emblématique reste celui de l’ancien député social-démocrate et président de région David Rath accusé de corruption, trucage d’appels d’offres publics, détournement de fonds européens et récemment condamné à huit ans et demi de prison.

Si la multiplication de ces affaires hautement médiatisées peut laisser songeur sur le degré de malversations qui ronge encore le monde politique tchèque, la bonne nouvelle reste néanmoins qu’elles semblent de moins en moins passées à la trappe.