Le Grand Jeudi du Livre

Фото: Кристина Макова
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Le 11 octobre dernier a été organisé en République tchèque pour la deuxième fois « le Grand Jeudi du Livre ». Dans le cadre de cette manifestation, plusieurs éditeurs tchèques ont lancé sur le marché douze nouveautés qui représentent le meilleur de la production littéraire qui paraîtra en République tchèque cet automne. Neuf des douze livres de cette série de titres majeurs de la rentrée littéraire ont également été publiés sous forme numérique.

La petite Marie Jana Korbelová | Photo: Madeleine Albrightová,  Pražská zima/Argo
La première édition du Grand Jeudi du Livre à l’automne 2011 avait déjà été très bien reçue et avait considérablement augmenté les recettes des libraires. Parmi les douze titres choisis par les éditeurs cette année, il y a entre autres « L’hiver de Prague », livre de souvenirs de l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Madeleine Albright, le dernier roman policier du célèbre auteur norvégien Jo Nesbø « Le Bonhomme de neige », un récit autobiographique de Martina Formanová, épouse du réalisateur Miloš Forman et le roman « Joseph Anton » dans lequel Salman Rushdie raconte comment il a vécu la fatwa lancée contre lui par l’ayatollah Khomeiny. Le directeur de la maison d’édition Kosmas, Josef Žák, qui est le principal organisateur des Grands Jeudis du Livre, a révélé ses œuvres favorites figurant sur la liste :

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« Mon livre favori est sans doute le roman graphique ‘Là où vont nos pères’ de l’écrivain australien Shaun Tan, ouvrage qui est une véritable friandise parmi les livres choisis. (…) Je me réjouis également beaucoup de pouvoir lire l’autobiographie de Salman Rushdie. Bien que ce soit un très gros volume, je crois que ce sera une lecture très intéressante. Pour mon fils, j’ai déjà choisi le livre ‘Gangsta Granny (Grand-mère voleuse)’ de David Walliams qui prouve que les Britanniques savent bien écrire des livres humoristiques pour enfants. J’espère que ce livre pourrait détourner un peu mon fils de sa sempiternelle littérature ‘fantasy’. C’est de l’humour noir britannique pour jeunes lecteurs. »

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Sur la liste figure également un ouvrage tchèque destiné aux enfants. Pavel Čech, auteur de ce livre intitulé « Les Aventures de Pepík Střecha » s’est inspiré de la célèbre série de romans d’aventures pour jeunes garçons de Josef Foglar, maître incontestable de ce genre littéraire. Parmi les auteurs de la série il y a même un Prix Nobel de littérature. La maison Academia a publié le roman « La Bible d’un homme seul », deuxième ouvrage traduit en tchèque de l’écrivain chinois Gao Xingjian. Les organisateurs de cette espèce de palmarès de la rentrée littéraire ont fait également plaisir aux fans de l’écrivaine tchèque Petra Hůlová en choisissant son dernier opus intitulé « La Tchéquie, terre promise » qui raconte la vie difficile d’Olga, une Ukrainienne contrainte de vivre à l’étranger. Jiří Vlček, fondateur de la société Palmknihy.cz qui se spécialise dans la vente de livres numériques, apprécie et appuie l’initiative des organisateurs du Grand Jeudi du Livre :

Photo: Radio Prague
« J’ai beaucoup de sympathie pour ces activités parce que j’ai l’impression que les lecteurs n’arrivent pas à identifier les bons livres dans l’avalanche de nouveaux titres qui déferlent sur les librairies. Annuellement paraissent en Tchéquie presque 20 000 nouveaux titres et le lecteur moyen n’a pas la chance de distinguer la bonne et la mauvaise production. Et ici on attire l’attention sur les livres dont la qualité est garantie par quelqu’un, les livres auxquels on fait confiance et dont on assure la publicité. Ces livres ont donc un sens. L’année dernière les lecteurs avaient apprécié cette initiative, et je crois qu’ils l’ont appréciée aussi cette année. »

Neuf des douze livres de la série ont paru simultanément sous forme numérique et les lecteurs peuvent les lire sur l’écran de leur liseuse. Cela reflète l’entrée massive du livre électronique sur le marché tchèque. Jiří Vlček constate :

Photo: Radio Prague
« Par rapport à l’année dernière, le nombre de livres numériques a augmenté douze fois et, que je sache, dans certains domaines et en ce qui concerne certains titres, les ventes de livres électroniques sont comparables à celles de livres imprimés. Je dirais que ce marché se développe très bien. (…) Je ne pense pas que ce soit apprécié uniquement par les jeunes parce que c’est aussi très avantageux pour les gens âgés qui peuvent facilement agrandir les caractères pour lire plus facilement. Il s’avère donc que même les retraités, les gens dont la vue est affaiblie par l’âge, achètent les livres électroniques et en sont contents. »

Selon Jiří Vlček donc, l’avant-garde des jeunes qui ont commencé il y a quelques temps à lire les livres électroniques, n’a plus le monopole de ce genre de lecture. L’éditeur de livres en ligne Josef Žák espère même que ce nouveau média et cette nouvelle façon de lire attirera de nouveaux lecteurs :

« Je crois que les livres numériques ne sont pas lus seulement par ceux qui ne lisaient jusqu’à présent que les livres imprimés. Je pense qu’il s’agit par exemple des gens qui ne lisent pas les livres classiques pour diverses raisons. Parfois ils n’ont pas le temps d’aller en librairie ou ils manquent de place pour stocker les livres classiques chez eux, etc. Je connais dans mon entourage plusieurs personnes, surtout des hommes, qui ont recommencé à lire grâce à la liseuse. »

Photo: Radio Prague
Le livre numérique pourrait donc modifier, selon Josef Žák, même le rapport des gens vis-à-vis de la lecture en général. A son avis, ce nouveau média apporte la possibilité du développement de nouvelles formes et de nouveaux genres littéraires. Il rappelle dans ce contexte qu’à l’étranger ont déjà été créées spécialement pour le livre électronique des séries littéraires à succès et constate que ces séries de courts épisodes qui paraissent par intervalles, sont plus acceptables, plus digestes pour les jeunes qui en général n’aiment pas lire de longs textes.

Toujours est-il que, malgré son succès commercial incontestable, le livre électronique n’est pas perçu et reçu favorablement par tous les lecteurs et tous les auteurs. Il y en a et il y en aura sans doute toujours qui préféreront pour diverses raisons le livre classique à la liseuse. Il y a et il y aura même des genres littéraires et graphiques dont la beauté ressortira mieux dans un livre imprimé. C’est aussi un des arguments de ceux qui refusent d’accepter cette nouvelle façon de lire. Jiří Vlček rappelle que le livre numérique ne fait pas l’unanimité même parmi les écrivains :

« Ces auteurs existent évidemment. Il me vient à l’idée par exemple le cas de Milan Kundera qui est un des grands adversaires de la publication de livres sous forme électronique. C’est le droit de ces auteurs. Chaque auteur crée une œuvre complexe qui a entre autres aussi une forme graphique, une forme physique. L’auteur a le droit de faire le choix. »