Le PEN club tchèque face aux défis de notre temps

Jiri Stransky et le ministre de la Culture Pavel Dostal, photo: CTK
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Le 80ème anniversaire de la fondation du PEN club tchèque a non seulement permis d'attirer l'attention des médias sur cet organisme par une conférence de presse et une exposition, mais c'était aussi une occasion de se pencher sur son rôle actuel.

Jiri Stransky et le ministre de la Culture Pavel Dostal,  photo: CTK
Fondé en 1925, quatre ans seulement après la fondation du PEN club anglais, le premier dans le monde, le PEN club tchèque connaîtra des hauts et des bas comme la littérature et l'histoire de notre pays. Il est fondé pour veiller au respect de la liberté de la parole et de la presse. C'est l'écrivain Karel Capek qui est l'artisan principal de sa création et aussi son premier président. Sous les régimes totalitaires, l'occupation nazie et le communisme, les activités du PEN club sont interdites. En 1989 cependant, il renaît à une vie nouvelle comme tout le pays et c'est Jiri Mucha, fils du peintre Alfons Mucha, qui est élu comme président.

"Depuis le congrès international du PEN club qui a eu lieu à Prague en 1994, nous jouissons d'une très bonne renommée," dit le président actuel du PEN club tchèque Jiri Stransky. "Jusqu'à aujourd'hui, on raconte des légendes sur ce congrès. Dans son cadre on y a organisé 52 manifestations dans 26 palais, c'était grandiose. Le Président Havel a déclaré, à ce moment-là, que le temps était venu pour que les écrivains fassent pression sur leurs gouvernements s'ils estimaient que ceux-ci agissaient mal."


Aujourd'hui il semble cependant que le temps de l'euphorie est révolu. Le PEN club tchèque peut survivre grâce aux sponsors, qui sont, d'après Jiri Stransky, moins sponsors que mécènes parce qu'ils ne reçoivent de la part du PEN club pratiquement rien en récompense. Le PEN club tchèque réunit 216 écrivains, poètes, historiens de littérature, critiques et traducteurs. Parmi eux, on trouve les deux Présidents tchèques, élus depuis la chute du communisme en 1989, Vaclav Havel et Vaclav Klaus. C'est un organisme qui suit les écrivains emprisonnés et proscrits dans le monde, cherche à les aider et oeuvre pour leur libération.

Depuis 1994, le PEN club tchèque décerne tous les deux ans le Prix Karel Capek et le Prix du Pen Club. Parmi les lauréats de ce prix on trouve, entre autres, Günter Grass, Philip Roth, Josef Topol, Ludvik Vaculik et Jan Vladislav. Il organise aussi des conférences consacrées à des thèmes historiques ainsi que d'autres manifestations. Jiri Stransky a présenté, lors de la conférence de presse, aussi deux autres initiatives préparées par Le Pen club tchèque. Il s'agit d'abord du Mois de la culture arabe qui sera organisé avec la participation de la municipalité de Prague. Jiri Stransky: "L'idée fondamentale de cette initiative est la suivante. Dans un monde divisé et détruit par des idéologies et les religions, les seules possibilités d'amener les gens à reprendre le dialogue, sont la culture et les relations culturelles. L'initiative a suscité déjà un grand retentissement et je pense que rien n'empêchera le projet de se réaliser."

Le PEN club tchèque envisage, également, de fonder un nouveau prix. A l'instar du Prix Nobel de la paix, il serait décerné aux individus et organisations ayant aidé des personnes et des groupes en détresse et les victimes de l'oppression. Selon les organisateurs, le Prix Nobel de la Paix est trop politisé, et ils cherchent donc une nouvelle possibilité pour distinguer ceux qui aident les opprimés et les démunis. Déjà le PEN Club international dispose, pour doter ce prix, d'une somme de 100 000 dollars.


Ivan Klima,  Daniela Fischerova et Pavel Dostal,  photo: CTK
Quel est aujourd'hui et quel sera à l'avenir le rôle du PEN club ? Comment réagira-t-il aux défis de notre époque? Est-ce que son rôle doit changer avec le temps ? L'écrivaine Daniela Fischerova, membre du PEN club tchèque, cherche les réponses à ces questions : "C'est le phénomène de notre époque, nous discutons de moins en moins de la littérature, du rôle de l'auteur et de la liberté de la parole et les réunions de notre comité du PEN club ressemblent de plus en plus à des discussions sur l'argent. Nous parlons de ce que nous devons, de ce qu'on nous doit, comment nous allons le payer etc. Ainsi les grandes questions de la littérature et de la liberté de la parole sont prises de court.

Cependant l'une des questions fondamentales qui s'imposent est celle-ci : l'écrivain en général peut être convaincu que la littérature existe en dehors de la morale, que ce n'est pas une affaire éthique mais que c'est de l'art. Par contre l'écrivain membre du PEN club ne peut pas penser de cette manière parce qu'en signant la Charte du PEN nous nous sommes engagés à adopter une attitude éthique très concrète. Si on la simplifie au maximum, on peut la résumer ainsi : La liberté de parole est bonne. Cela semble tout à fait évident mais, comme la majorité des prémices éthiques, cela ne va pas de soi. Dans ce monde moderne qui discute de la liberté de l'information, nous nous trouvons face à la question suivante : Jusqu'où faut-il défendre la liberté de parole, jusqu'où cette liberté est-elle encore ce bien fondamental digne d'être défendu et à quel moment elle devient un instrument dangereux entre les mains des fanatiques et des démagogues qui auraient la possibilité de dire ce qu'ils voudraient. Est-ce que nous, puisqu'il s'agit de la liberté de parole, nous avons le devoir de les défendre ? C'est, d'après moi, une des questions de notre époque."