Revue de presse : de la visite du président chinois aux condamnations à mort en Tchécoslovaquie

Xi Jinping et Miloš Zeman, photo: ČTK

La visite du président chinois Xi Jinping en République tchèque, la situation et les perspectives des partis et mouvements radicaux en Tchéquie, et les nouvelles tendances sur les réseaux sociaux : tels sont les trois principaux thèmes qui seront traités dans cette nouvelle revue de la presse tchèque. Nous reviendrons aussi sur les dizaines de condamnations à mort de femmes en Tchécoslovaquie dans la seconde moitié des années 1940 ou encore apporterons quelques détails sur une grande coproduction télévisée tchéco-chinoise.

Xi Jinping et Miloš Zeman,  photo: ČTK
Accompagnée de protestations d’activistes opposés au rapprochement avec Pékin, la visite de Xi Jinping à Prague, première visite d’un président chinois en République tchèque, a dominé cette semaine l’actualité dans la presse locale. Tout en évaluant le contexte politique ambigu de cette visite, les éditorialistes se sont penchés également sur son aspect économique. Une trentaine d’accords de coopération dans différents secteurs d’activités ont été signés, accords sur la base desquels la Chine s’apprête à investir près de 100 milliards de couronnes en République tchèque rien que pour cette année. Dans une analyse publiée dans le quotidien Lidové noviny, qui remarque que « les milliards chinois sont source aussi bien de réactions enthousiastes que critiques », Kateřina Menzelová notait ainsi :

« Les investissements chinois en Europe ne cessent d’augmenter. La Tchéquie ne fait donc que se joindre aux autres pays européens intéressés par ces investissements. Il y a encore peu de temps de cela, la Tchéquie ne figurait pourtant pas au cœur de l’intérêt chinois. Parmi les pays d’Europe centrale et de l’Est, ce sont la Hongrie, la Roumanie et la Pologne qui ont été privilégiés dans un premier temps. De ce point de vue, la Tchéquie représente donc un important tournant. »

A ce jour, ce sont néanmoins le Japon et la Corée du Sud qui ont été et restent les deux plus importants investisseurs asiatiques en République tchèque. Cité dans le texte de Lidové noviny, Rudolf Furst, de l’Institut des relations internationales, confirment que les investissements chinois dans le pays n’avaient jusqu’à présent qu’un caractère marginal. Ainsi, aucun investisseur chinois ne figurait en 2015 parmi les dix plus importants investisseurs étrangers selon le classement établi par CzechInvest, l’agence nationale de soutien aux entreprises et aux investissements. « L’intérêt est de savoir ce que révéleront les données pour 2016 », conclut l’analyse.

Les partis et mouvements radicaux en Tchéquie demeurent émiettés

Photo: Archives de Radio Prague
La situation et les perspectives des partis radicaux en République tchèque sont le sujet d’un reportage publié dans la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt. Son auteur décrit les rassemblements de plusieurs d’entre eux qui se sont tenus dans différents endroits du pays. Sur la base de ce qu’elle a vu et entendu, la reporter constate :

« A quelques mois des élections sénatoriales et régionales qui seront organisées à l’automne, la question épineuse de la crise migratoire est d’ores est déjà omniprésente dans les villes et communes de Bohême et de Moravie. Chaque semaine se tiennent des manifestations et débats durant lesquels divers groupuscules radicaux leur promettent une vie satisfaisante en les protégeant des musulmans ou encore en faisant sortir le pays de l’Union européenne. »

Il existe en Tchéquie plusieurs dizaines de petits partis et mouvements qui tiennent un discours radical relatif à la crise migratoire. Comme l’écrit l’auteur du reportage, un seul cependant parmi eux, le Parti ouvrier de justice social (DSSS), un parti néonazi, est retenu dans les sondages avec environ 1% d’intentions de vote, les autres atteignant un score plus faible encore. Pour que ces partis puissent franchir la barre de 5% et ainsi être élus, ils devraient s’unir, une chose toutefois difficilement envisageable aujourd’hui compte tenu de la rivalité qui existe entre eux. Ivana Svobodová remarque également :

« Si l’on s’en tient aux derniers sondages, la xénophobie au sein de la population tchèque n’est pas très élevée. Il est cependant difficile de prévoir si, finalement, on ne verra pas les radicaux tchèques réussir dans leur entreprise, car ils sont encouragés par une avalanche de pages de conspiration sur différents sites internet, ainsi que par une perte générale de confiance vis-à-vis des médias traditionnels. Ne pas démoniser les gens qui ont peur de l’élément étranger est, aux dires des sociologues, un des moyens d’éviter cela. »

Ce que révèlent les réseaux sociaux

Photo: Kristýna Maková
La question des migrants figure moins au cœur de l’intérêt des utilisateurs des réseaux sociaux qu’il y a quelques mois de cela. C’est ce que signale un article mis en ligne sur le site idnes.cz dans lequel on peut lire également :

« Les réseaux sociaux contiennent un grand nombre de commentaires relatifs aux migrants qui constituent pour certains Tchèques des spectres sombres qui hantent l’Europe ou des terroristes, et non des gens qui fuient la guerre. Ceci dit, les statistiques révèlent qu’il s’agit d’un sujet qui a atteint son point le plus élevé durant l’été dernier, mais qui a fléchi depuis. Tandis que, par exemple, l’initiative ‘Nous ne voulons pas de l’islam en Tchéquie’ avait obtenu plus de 60 000 ‘J’aime’ sur Facebook en septembre (à mettre en relation avec les quatre millions d’utilisateurs tchèques), leur nombre a diminué de moitié vers la fin de l’année. »

Selon l’analyste des réseaux sociaux Josef Šlerka, on peut dès lors s’attendre à ce que les politiciens qui avaient tendance à miser sur la carte anti-immigration, le fassent désormais moins souvent. L’expert cité considère parallèlement que l’internet tchèque ne comporte pas, sauf cas exceptionnels, d’éléments fascisants comme on aime le prétendre, sinon de nombreuses contributions émotionnellement exacerbées ou vulgaires.

Pour sa part, le site aktualne.cz informe des résultats d’une étude effectuée par l’ONG People in need, qui démontre que parmi les auteurs de commentaires agressifs et haineux sur les réseaux sociaux prédominent les hommes âgés de trente à cinquante ans qui possèdent une formation secondaire technique. Une façon là de faire mentir l’idée répandue qui attribue de tels textes aux personnes issues de milieux socialement défavorisés.

Après 1945, des dizaines de femmes ont été condamnées à mort en Tchécoslovaquie

Photo illustrative: Archives de Radio Prague
Le nouveau film tchèque « Moi, Olga Hepnarová », qui raconte l’histoire de la dernière femme à avoir été exécutée en 1975 dans l’ancienne Tchécoslovaquie et a été bien accueilli par la critique, soulève plus d’une question. A l’occasion de sa sortie en salle, l’historien Petr Zídek a tenu à rappeler, dans le journal Lidové noviny, d’autres cas de condamnations de femmes, au nombre de soixante-sept, entre 1945 et 1948. Il précise :

« Une majorité des femmes qui ont été exécutées au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale étaient des dénonciatrices. Il s’agissait pour la plupart de femmes d’âge moyen, peu érudites, qui, en dénonçant leurs voisins, des membres de leurs familles ou même leur époux, cherchaient à résoudre leurs problèmes personnels. En vertu de la loi de rétribution, la délation d’un citoyen tchécoslovaque constituait à l’époque un crime passible de la peine de mort. Parmi ces femmes, on trouvait aussi, mais beaucoup moins, des gardes de camps de concentration ou des collaboratrices des services de sécurité nazis ».

Tout en estimant que la plupart des femmes condamnées ont mérité cette peine pour avoir causé la mort d’une ou de plusieurs personnes, l’auteur de l’article admet cependant que certaines causes laissent place au doute. Ce qui peut paraître étonnant aujourd’hui est le fait que les tribunaux ne tenaient pas compte de la situation familiale des femmes condamnées, alors que, dans de nombreux cas, il s’agissait de mères parfois même de petits enfants. Petr Zídek constate enfin que cette page sombre de la seconde moitié des années 1940 a été insuffisamment étudiée jusqu’à présent.

L’intérêt pour Prague des cinéastes chinois

'Le dernier visa',  photo: Twin Star Film
Le quotidien économique Hospodářské noviny a informé de la réalisation en coproduction tchéco-chinoise d’une nouvelle série télévisée en notant :

« Intitulée ‘Le dernier visa’, cette série raconte l’histoire authentique d’un consul chinois à Vienne dans la seconde moitié des années 1930, Cho feng-shan, surnommé ‘Oscar Schindler de Chine’. Celui-ci, de concert avec d’autres diplomates chinois et en dépit des pressions politiques, a réussi à accorder des visas à des Juifs qui ont ainsi pu fuir et se réfugier en Chine. Entre 1936 et 1938, années pendant lesquelles le consul a travaillé à Vienne, l’ambassade de Chine a accordé près de 5000 visas à cette fin, un acte qui rappelle celui du Britannique Nicholas Winton qui a sauvé des centaines d’enfants tchèques pendant la Deuxième Guerre mondiale. »

Une importante partie de cette série réalisée en versions tchèque, chinoise et anglaise, avec la participation d’une trentaine d’acteurs tchèques, a été tournée en République tchèque. Le site rappelle ici que les films que les cinéastes chinois ont précédemment réalisés dans la capitale tchèque, ont fortement renforcé l’intérêt des touristes chinois pour la Tchéquie.